L'élevage comme cheval de bataille

 Il n'est pas peu fier de ses bêtes. Et il a de quoi : Fabien Walt est le seul éleveur alsacien à présenter ses chevaux - deux selles français - à la finale nationale du concours d'élevage. Cette dernière aura lieu à Lyon, à la fin du mois d'octobre. « Je suis vraiment surpris de leur performance », s'étonne-t-il encore. Au concours interrégional de Rosières-aux-Salines, en Lorraine, la jument Sirlight-des-Elys s'est classée première ex æquo tandis que son congénère Sacramento-des-Elys a terminé deuxième. Des places qui les qualifient d'office pour la phase ultime de la compétition.

 Il faut dire que le jeune éleveur de Rott travaille d'arrache-pied pour que ses chevaux arrivent au meilleur niveau. Chaque matin, avant de partir travailler en Allemagne, il se lève à 4 h 30 pour s'occuper des animaux. Et répète le même rituel quand il rentre du boulot, vers 17 h. Il reste alors dehors, à bichonner les chevaux, jusqu'à 20 h. « Même 22 h en été ! », s'exclame sa femme, Patricia, qui partage la même passion équine et aide volontiers son mari à la tâche. D'ailleurs, quand il s'agit de s'occuper et d'entraîner les animaux, tout l'entourage du couple met le pied à l'étrier. « On n'y arriverait pas sans l'appui de la famille et des amis », assure-t-il.
 Car les éleveurs se sentent en effet quelque peu acculés. Ils regrettent le manque de soutien - à la fois officiel et associatif - au milieu équestre alsacien. « C'est dommage car la qualité est là, il y a vraiment de bons éleveurs dans la région. Mais la tradition est en train de s'enterrer, déplorent-ils. Nous n'avons aucune aide. Tout est à notre charge. » Ainsi, pour aller à la finale à Lyon, le couple doit payer non seulement les frais de déplacement mais aussi trois nuits d'hôtel. Sans compter, tout au long de l'année, les dépenses liées à l'alimentation, aux saillies, aux consultations vétérinaires -« ça, ce n'est pas remboursé par la Sécu ! »
 Fabien et Patricia ont dû renoncer à se rendre à Saumur, en septembre, où des chevaux de leur élevage étaient pourtant qualifiés pour le concours d'orientation dressage. «  On ne peut pas tout faire  », soupirent-ils. Alors, qu'y a t-il donc à gagner en présentant des chevaux à un concours ? « Rien ! » répondent-ils, tout de go, en choeur. Rien... sauf peut-être la satisfaction de présenter, devant la crème du milieu équestre, un cheval du cru. « Sirlight est née et a été élevée ici, raconte Fabien. Et sa mère est de la région. C'est vraiment bien que la souche alsacienne soit représentée en finale. »
 Au concours, les éleveurs ont l'ambition modeste. « C'est déjà tellement bien d'être qualifiés, on espère juste terminer en milieu de tableau. » L'essentiel, à les croire, c'est de prendre du plaisir... et des vacances. « Il y a toujours une bonne ambiance dans ces rassemblements, on côtoie d'autres passionnés, explique Patricia. Et puis, ça permet aux enfants de bouger d'ici. » Maelys, 5 ans « bientôt et demi » et le petit Aaron, 20 mois sont en effet de tous les déplacements. Nul doute que comme leurs parents, le cheval deviendra aussi leur dada.

Enora Ollivier